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L'Église trouve sa mission dans le service de la Parole de Dieu

3. Le catéchiste comme témoin

Le messager authentique, l'évangélisateur, est un témoin. Or sans l'implication existentielle qui fait de l'auditeur un témoin pleinement investi de la puissance de la Parole, l'activité de prédication et de catéchèse est destinée à demeurer stérile. Saint Augustin avertissait déjà que « celui qui n'écoute pas de l'intérieur la parole de Dieu devient un vain prédicateur de la Parole à l'extérieur » (Sermons 179; PL 38,966). La crédibilité de l'annonce passe ainsi par cette implication personnelle qui fait que ce que le catéchiste annonce est également ce dont il vit.

4. Église et prophétie

L'Église ne prêche pas son propre message, mais la parole de Dieu (voir 2Co 4,5: « Ce n'est pas nous que nous prêchons, mais le Christ Jésus, Seigneur »). Et le message de l'Église est authentique dans la mesure où elle parle, annonce, célèbre, et vit la parole de Dieu: non pas une parole sur Dieu, mais la parole de Dieu (1Th 2,13). Il faut donc que les catéchistes veillent à ne pas manipuler la parole, à ne pas la banaliser, à ne pas la confondre avec des mots qui seraient à la mode, à ne pas l'abaisser au niveau de leurs propres paroles. C'est du caractère prophétique de la mission de l'Église qu'il en va. Le propre de la mission de l'Église est de savoir dire aujourd'hui la parole éternelle de Dieu, de savoir annoncer aujourd'hui « le Christ qui est le même hier, aujourd'hui et à jamais » (He 13,8), de savoir décliner « l'évangile éternel » (Ap 14,6) pour l'aujourd'hui. Et c'est là aussi le défi que les catéchistes sont appelés à relever. Cela doit les engager dans une tâche d'intelligence créative, et tout à la fois fidèle.

Il n'est pas facile de discerner les signes des temps: les résultats d'enquêtes sociologiques n'y suffisent pas, mais il s'agit toujours d'une opération spirituelle. En particulier, il me semble que ceux qui annoncent l'évangile aujourd'hui sont appelés à le faire en prêtant une écoute profonde à l'humanité des personnes à qui ils s'adressent. En montrant que la parole de Dieu et la personne du Christ ont beaucoup à dire à la vie humaine, qu'ils savent orienter l'humain et le mettre en valeur, les catéchistes pourront être crédibles pour présenter le Christ comme « chemin, vérité et vie » (Jn 14,6). L'évangélisation et la catéchèse devront donc s'accompagner d'une grande attention à l'humain, à ses potentialités et à ses faiblesses, à ses blessures, à ses souffrances, à ses problèmes, ainsi qu'à ses beautés et à ses joies. Et elles devront savoir ne jamais juger, mais corriger et orienter avec fermeté et douceur. Cela est essentiel en particulier devant des jeunes qui doivent trouver le temps et la manière de se dire, de dire leurs problématiques humaines, pour pouvoir accéder à une adhésion à la parole et à la personne de Jésus. La parole de Dieu, dont l'humanité de Jésus de Nazareth a fait le récit, exige de ceux qui l'annoncent qu'ils sachent la vivre et la transmettre comme une réalité humanisante, capable d'ouvrir un horizon et de créer sens dans des situations humaines concrètes.

Si le prophète est celui qui fait signe, l'Église, obéissant à son mandat prophétique, est appelée à être signe et à décliner sa vocation prophétique comme une « invention de sens », comme découverte et création de sens. Les théoriciens du post-moderne nous disent que les questions d’aujourd’hui – et plus encore celles de demain – concernent la fonctionnalité et l’utilité des choses, des notions et des savoirs («À quoi ça sert? Est-ce efficace? Est-ce rentable?»), et non leur vérité ou leur beauté: l’Église peut alors résister à cette tendance, en cherchant à se situer comme un lieu où – par obéissance à la parole de Dieu qui donne sens à l'histoire et au monde – la question du sens est sauvegardée comme ce qui peut véritablement humaniser l’homme.

Si la prophétie est historique, si elle utilise toujours des langages différents et prend des formes nouvelles, en s’adaptant aux diverses situations historiques, culturelles, géographiques, elle doit aujourd’hui assumer, dans nos pays et dans nos Églises, la forme de l’invention du sens, en vivant et en transmettant la foi comme un «chemin de sens». C’est l’essence même du christianisme qui est en jeu, lui qui vit de la promesse de Dieu accomplie et relancée en Christ; il en va donc aussi de la raison d’être de l’Église, qui vit de la mémoire de la passion, mort et résurrection du Christ comme événement et promesse de salut pour l’humanité. Ces mots de Dietrich Bonhoeffer prennent aujourd’hui une force inégalée: «La notion non biblique de “sens” n’est qu’une traduction de ce que la Bible appelle “promesse”.» Dans le Nouveau Testament, cette promesse prend le nom et le visage du Christ, et elle exige des communautés chrétiennes qu’elles sachent faire le récit du Christ qui «nous enseigne à vivre» (Tt 2,12), qui donne ainsi une direction, une finalité, une signification et une beauté à la vie humaine.

Honorer le Christ qui enseigne à vivre, cela signifie transmettre des symboles et des clés herméneutiques de la réalité, rappeler que l’être humain est tel s’il continue à s’interroger sur soi-même, à réfléchir à la mort, à accepter comme le constituant les énigmes qu’il découvre en soi, à reconnaître dans la rencontre et dans la relation avec l’autre la beauté possible de l’existence, à se percevoir soi-même comme une tâche à réaliser. Cela signifie valoriser la dimension sapientiale de l’Écriture et de la figure même du Christ, manifester dans sa propre vie que le Christ est un motif suffisant pour vivre, que des hommes et des femmes peuvent se réunir et vivre ensemble une vie humanisée au nom du Christ, par amour pour lui et à cause de lui. Cela signifie rappeler que le Christ, et donc l’Évangile, la promesse du Père, peut devenir un motif pour donner sa vie et pour affronter la mort, qu'il peut ainsi donner un sens à la mort après avoir donné sens à la vie. La prophétie la plus radicale du christianisme est sans doute que la mort n’a pas le dernier mot, mais que la Parole de Dieu peut rappeler les morts à la vie. Annoncer le Christ ressuscité comme la parole définitive et salvifique de Dieu pour l'humanité, voilà la tâche prophétique de l'Église pour tous les temps.